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05/09/2009

Obama, les chiens sont lâchés

 Par Catherine Morand, journaliste - Le Matin Dimanche - le 6 septembre 2009

 

Aux Etats-Unis, c’est le branle-bas de combat. Le parti républicain a battu le rappel de ses troupes, mobilisé ses cellules, qui sont chauffées à blanc par une propagande haineuse et nauséabonde. Les groupes de pression et autres think tanks ultraconservateurs tels American for Prosperity ou Freedom Works ont reçu des sommes colossales pour organiser la résistance. La cible ? Le président Barack Obama et sa réforme du secteur de la santé.

 

Ce système réussit pourtant le tour de force d’être le plus cher du monde tout en condamnant  47 millions d’Américains à vivre sans couverture médicale. En raison de la crise, un nombre croissant de personnes, même si elles ont une assurance, doivent choisir entre se soigner et alors s’endetter pour le restant de leurs jours. Ou mettre leur vie en danger et risquer d’aller grossir les rangs des quelque 20 000 personnes qui meurent chaque année aux Etats-Unis pour n’avoir pas réussi à payer elles-mêmes les soins et les médicaments dont elles avaient besoin.

 

Dans ce contexte, comment comprendre que Barack Obama doive affronter des foules aussi menaçantes, qui brandissent des posters où il est grimé en Hitler ou en Joker, le grand méchant dans les films de Batman ? C’est que l’industrie médicale et pharmaceutique, les sociétés d’assurances, les groupes hospitaliers, extrêmement puissants, mettent le paquet et sont prêts à tout pour conserver ce fabuleux marché. Ils avaient déjà dépensé 100 millions de dollars pour tuer dans l’œuf la réforme tentée par Bill Clinton. Et sont en train d’exploser ces chiffres pour briser Barack Obama.

 

A Washington, on compte 3300 lobbyistes qui roulent pour l’industrie de la santé, soit six pour chaque député. Ses intérêts sont si bien défendus qu’aujourd’hui, l’OMS classe les Etats-Unis à la 37e place pour la qualité globale de leur système de santé, entre le Costa Rica et la Slovénie. Pour comprendre, il faut remonter à l’ultralibéralisme triomphant des années Reagan, où les règles du marché ont été appliquées au système de la santé. La « main invisible » a tellement bien fonctionné qu’elle a offert aux USA le pire système de santé du monde occidental.

 

Aujourd’hui, le business hospitalier ne veut céder sur rien. Et le bras de fer s’annonce sanglant. Pendant ce temps, dans une atmosphère très « camp de réfugiés », les files d’attente formées de nécessiteux et de working poors continuent de s’allonger devant les salles de sport, les terrains vague où des caravanes de médecins et de dentistes offrent des soins gratuits à leurs compatriotes. Comme ils avaient l’habitude de le faire auparavant au Guatemala ou au Congo.

 

29/06/2009

T-shirts Ben Laden ou Obama ?

Par Catherine Morand, journaliste - Le Matin Dimanche - le 28 juin 2009

  

L’Obamania qui avait enflammé l’Afrique au moment de la campagne présidentielle américaine n’est de loin pas retombée. Sur les marchés d’Abidjan, d’où j’écris ces quelques lignes, l’effigie de Barack Obama se décline en T-shirts, calendriers, casquettes, mais aussi à l’arrière des minibus de transport, sur les enseignes des maquis-restaurants et celles des coiffeurs, où l’on vous propose volontiers  la coupe du président américain. Au Niger, si l’on continue d’appeler « Bush » les chiens errants, on donne en revanche le surnom affectueux d’ « Obama » aux enfants brillants et prometteurs.

 

Pourtant, il n’y a pas si longtemps, au plus fort de l’ère Bush, c’est la tête d’Oussama Ben Laden que les jeunes et même les cadres arboraient ostensiblement sur leurs T-shirts, de Nouakchott à Douala, pour marquer le rejet et le dégoût que leur inspirait la politique américaine. Aujourd’hui, les mêmes portent une casquette « Yes we can ». C’est dire l’ampleur du changement.

 

L’ascendance africaine de Barack Obama joue certes un rôle dans cet élan général de sympathie qui génère d’innombrables fans clubs. Mais il y a plus que cela. Les gens suivent et lisent avec attention ses discours brillants et profonds et espèrent qu’avec lui s’ouvre « une nouvelle ère moins heurtée pour l’humanité », comme le soulignait un quotidien sud-africain.

 

Pour sa première visite officielle en Afrique subsaharienne les 10 et 11 juillet prochain, ce n’est pas au Kenya, d’où son père est originaire, que Barack Obama se rendra. Mais au Ghana, l’un des rares pays du continent qui connaisse une alternance démocratique et sans heurts. Un choix qui réjouit tous ceux qui, en Afrique, attendent non pas une pluie de dollars, mais que les USA renoncent à soutenir des régimes autoritaires et corrompus.

 

La comparaison risque d’être à nouveau cruelle pour le président français Nicolas Sarkozy, qui effectuait en mars dernier une visite style « Françafrique décomplexée », comprendre : on bétonne tous azimuts nos positions pour contrer l’offensive chinoise. Avec à la clé, la signature de contrats portant sur de fabuleux gisements d’uranium et de pétrole dans les deux Congo et au Niger.

 

Cette politique affairiste, qui passe par un appui sans faille à des dictateurs au petit pied, risque bien d’être ringardisée par le discours sur la gouvernance que prononcera Barack Obama au Ghana. Alors qu’Obama, une fois de plus, semble avoir rendez-vous avec l’Histoire, Sarkozy s’accroche à des pratiques déshonorantes pour la France, que la mort du président gabonais Omar Bongo, pilier de la « Françafrique », vient d’éclairer d’une lumière crue.