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24/02/2014

Elle court, elle court, la rumeur...

Lorsque la rumeur se répand et échauffe les esprits, les démentis sont souvent impuissants à la désamorcer, ou au contraire la renforcent. Et rien ni personne ne peut en venir à bout. Jusqu’à ce qu’elle s’apaise d’elle-même, vogue vers d’autres contrées, ou non.

C’est l’amère expérience que font depuis des mois, voire des années pour certains, des maires de villes françaises, accusés par une rumeur persistante de faire venir chez eux, avec compensation financière à l’appui, des hordes d’étrangers, d’origine africaine, résidant dans  le « 9-3 », un département dans la banlieue parisienne.

Les élus des villes du Man, de Poitiers, Reims, Vichy, Limoges, Niort, Châlon-en-Champagne, et même de Tulle, le fief du président François Hollande, ont beau s’époumoner, démentir avec la dernière énergie, dire qu’il ne s’agit là que de ragots de bas étage, rien n’y fait… La rumeur ne cesse d’enfler. A tel point que l’une des dernières éditions d’Envoyé Spécial,  la prestigieuse émission de reportage de France 2, y a consacré une enquête détaillée.

La maire de Niort, dans les Deux-Sèvres, Geneviève Gaillard, a finalement décidé de porter plainte, après avoir tout essayé. Elle a même été mise en cause personnellement dans sa vie privée, puisque la rumeur a couru qu’elle s’était mariée avec une personne d’origine africaine. Le texte de la plainte fait état de rumeurs qui prétendent « que des personnes de couleur noire, originaires de Seine-Saint-Denis ou d’ailleurs, mais en tout cas d’origine non-niortaise, sont réputées faire courir à la population un risque d’augmentation de la délinquance ». Cette rumeur a été qualifiée de raciste par de nombreux médias et personnalités politiques.

Dans la même veine, à Châlons-en-Champagne, le maire Benoist Apparu, est accusé de « faire venir des trains spécialement d’Ile-de-France, de voter des subventions en faveur de ces populations, d’octroyer la gratuité du permis de conduire, ou encore de percevoir 6000 euros par personne accueillie ».  Tout est faux, et le maire a également déposé plainte. En filigrane, les élus, de tous bords politiques, suspectent des groupuscules et des personnes proches du Front National de répandre ces rumeurs, pour attiser les craintes et les ressentiments de la population.

Du coup, les spécialistes en « légendes urbaines », comme on dit, se sont emparés de l’affaire, pour expliquer qu’il n’y avait pas de bonne solution : en restant muets, les élus contribuent à alimenter les fantasmes. Le démenti ne fonctionne pas non plus. La plainte en revanche, même si elle n’aboutit pas, peut se révéler payante, car elle s’accompagne d’une enquête indépendante. Mais dans tous les cas de figure, les dégâts sont énormes.

Sous toutes les latitudes, des rumeurs plus ou moins farfelues enflamment les esprits. Qui ne connaît pas la rumeur des voleurs ou rétrécisseurs de sexe, qui a touché tour à tour tous les pays d’Afrique de l’Ouest et centrale, ou encore celle des numéros de téléphone qui tuent ? Une constante : les personnes mises en cause sont le plus souvent des étrangers. Et les issues sont parfois dramatiques, avec mort d’homme à la clé. C’est ce qui s’était passé en octobre dernier à Madagascar, après la découverte du corps mutilé d’un enfant de 8 ans, rejeté par la mer sur une plage. Deux Européens accusés d’être à l’origine d’un trafic d’organes, ont été brûlés vifs par les villageois, pris d’une folie collective. Sans aucune preuve de la culpabilité des deux « Blancs ».

Les chefs d’Etat sont eux aussi régulièrement sujets des rumeurs les plus folles. Le mois dernier, c’est le chef de l’Etat rwandais Paul Kagamé qui en a fait les frais, avec l’annonce de sa mort, relayée sur les réseaux sociaux. A tel point que des habitants de Goma, dans l’est de la RDC, sont descendus dans la rue pour manifester leur joie ; des jeunes ont même défilé avec un cercueil symbolique. Après le démenti de la fausse nouvelle, le hit-parade des « nécrologies anticipées les plus populaires » s’est aussitôt retrouvé sur facebook et twitter…

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