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28/11/2013

La Chine copie-colle villes et monuments

Imaginez le choc si un jour, vous découvriez que votre ville, l’un de ses monuments, ou encore votre bar préféré, ont été reproduits à l’identique à des milliers de kilomètres de chez vous... Eh bien, c’est exactement ce qui est arrivé au maire d’un petit village autrichien du nom de Hallstatt, qui a appris par hasard que son agglomération avait été clonée en Chine, au fin fond de la province de Guandong. Les 800 habitants de ce petit village très touristique, inscrit au patrimoine de l’Unesco, sont demeurés choqués en apprenant que leurs maisons, et même leur église, avaient été fidèlement copiés sous d’autres cieux, sans qu’ils n’en aient jamais été informés. Et ils ne sont pas les seuls. C’est également par hasard, en lisant un journal, que les habitants de Thames Town, petit ville typique d’Angleterre, avaient été informés que leurs rues avaient été plagiées dans la région de Shanghaï, avec son pub, ce bar typiquement britannique, et qu’on y sert même de l’authentique bière anglaise…

Cela fait en effet plusieurs années que les Chinois reproduisent avec une grande minutie des villes, des villages, des monuments, des châteaux vus ailleurs.  A Tiandu Cheng par exemple, à 200 km au sud-ouest de Shanghai, un projet urbanistique reproduit Paris, avec sa tour Eiffel de 108 mètres (un tiers de la hauteur originale), son Arc de Triomphe, des rangées d’immeubles « haussmanniens », à l’image de ceux qui furent construits entre 1850 et 1920 dans la capitale. Ce complexe résidentiel, prévu pour accueillir plus de 100'000 Chinois fortunés,  devrait être achevé en 2015. Pour l’instant, c’est plutôt une ville fantôme, qui accueille parfois des jeunes mariés, prenant la pose devant un Paris en toc.

Les Chinois ne sont certainement pas les seuls à s’enthousiasmer pour des villes ou des monuments découverts sous d’autres cieux, à tel point qu’ils ont voulu le reproduire chez eux. On peut par exemple citer la basilique Saint-Pierre de Rome clonée à Yamoussoukro, ville natale du président ivoirien Félix Houphouët-Boigny. Une basilique qui fut également répliquée à la fin du 19e siècle en plein centre de Montréal au Canada. Ou encore le Château de Versailles qui figure parmi les bâtiments les plus copiés au monde, puisqu’on en trouve des reproductions partielles ou complètes en Allemagne (le château de Herrenchiemsee que fit construire Louis II de Bavière), en Autriche (le château de Schönbrunn), en Italie (le palais de Caserte près de Naples), au Portugal (le palais de Queluz près de Lisbonne)…

Preuve que la magnificence de bâtiments laïcs ou religieux, la beauté de villes prestigieuses ou de villages typiques, inspirent régulièrement des pastiches architecturaux, que les gens ensuite apprécient ou non. L’apparition en Chine de villes ou monuments occidentaux copiés au détail près fait bien entendu l’objet de critiques. « Ils feraient mieux de sauvegarder leur propre patrimoine architectural, plutôt que de copier celui des autres », s’indigne ainsi un internaute. « S’ils veulent nous imiter, c’est que nous avons quelque chose d’original et la copie drainera peut-être des touristes chinois vers l’original », s’était en revanche réjoui le maire de Cadaquès, village espagnol de pêcheurs où vécut Salvador Dali, en voyant des architectes chinois prendre des photos et des mesures de son hameau, pour le reproduire à des milliers de kilomètres.

Alors, du toc ou de l’authentique ? Mais au fait, ces villes clonées par la Chine sont-elles si différentes des parcs à thèmes qui poussent partout comme des champignons, des hôtels et centres commerciaux de Dubaï ou de Las Vegas qui reproduisent Venise, Paris, ou s’inspirent de l’Egypte, où se ruent des touristes venus de partout ? Et si la Tour Eiffel de Tiandu Cheng n’était finalement pas si différente du château de la Belle au Bois Dormant de Disneyland Paris - copie conforme de l’original californien - où petits et grands vont se précipiter pour les fêtes de fin d’année ?

Publié dans le Courrier de Genève le 22 novembre 2013

15/11/2013

Des otages libérés sur fond de bras de fer sur le prix de l'uranium

Les otages français qui ont été libérés au Niger sont des employés d’Areva, le géant français du nucléaire, et de Satom, une filiale du groupe Vinci, qui gère la partie logistique de l’extraction de l’uranium dans ce pays.

Cette libération, dans laquelle les autorités nigériennes ont pesé de tout leur poids, va-t-elle leur bénéficier, alors qu’elles ont demandé à ce que les contrats qui les lient à Areva soient renégociés ? Rien n’est moins sûr.

Le groupe français, présent au Niger depuis 1958, est pourtant très dépendant du Niger, qui a été en 2012, son deuxième fournisseur d’uranium, juste derrière le Kazakhstan, et devant le Canada, avec plus d’un tiers de son approvisionnement. Mais le « yellow cake » ne contribue qu’à hauteur de 5% du budget du Niger pour l’année 2012, avec des recettes fiscales de quelque 100 millions de dollars, un montant dérisoire, loin derrière l’agriculture et l’élevage, un comble.

Le président du Niger Mahamadou Issoufou, élu démocratiquement en 2011, estimant à juste titre ce partenariat déséquilibré, a annoncé au début de ce mois d’octobre qu’il souhaitait que ces contrats soient « passés au peigne fin », avant d’être renouvelés d’ici la fin de l’année.

Aux yeux de Ali Idrissa, journaliste et responsable du ROTAB, une organisation de la société civile nigérienne qui se bat dans le cadre de la campagne internationale « Publiez ce que vous Payez » pour une gestion transparente des ressources minières et pétrolières, il s’agit là « d’un tournant décisif de l’histoire du Niger », puisque jusqu’alors, et depuis plus de 40 ans, les contrats entre Niamey et Areva sont reconduits tacitement, « les yeux fermés ». Pour le plus grand bonheur du géant mondial du nucléaire. Un peu moins pour le Niger et la population vivant dans la zone d’extraction, qui a surtout hérité de 50 millions de tonnes de résidus radioactifs, et d’une nappe phréatique contaminée.

En voyant les gesticulations du président d’Areva Luc Oursel au cours de ces dernières semaines, on doute cependant qu’il soit prêt à entrer en matière. Il a tout d’abord effectué une visite éclair au Niger, le 7 octobre, pour rencontrer le président Issoufou. Areva a ensuite annoncé qu’elle allait devoir interrompre sa production d’uranium dans l’une de ses filiales au Niger. Ensuite, il y a quelques jours, Areva s’est empressée de signer un accord pour exploiter un gisement dans le désert de Gobi, en Mongolie ; histoire de bien faire comprendre à Niamey que si elle exige un meilleur prix pour son uranium, d’autres pays les attendaient les bras ouverts…

Un véritable bras de fer. Mais aussi une vision à très courte vue. Tout le monde a en effet intérêt à soutenir le président Mahamadou Issoufou dans sa volonté de tirer un meilleur parti des richesses de son sous-sol, lui qui évolue sur une corde raide, pris en étau entre ses compatriotes et tout particulièrement sa jeunesse, qui lui demandent d’améliorer leurs conditions de vie; et sa coopération avec la France et les Etats-Unis dans leur lutte contre le djihadisme, qui place son pays dans l’œil du cyclone.

Lors d’une conférence internationale qui s’était tenue au début de cette année en Suisse, le journaliste nigérien Ali Idrissa avait insisté pour dire à quel point il était important pour les entreprises minières et pétrolières de payer un prix correct pour les produits qu’elles extraient du sous-sol du Niger et d’autres pays africains. Et aussi de créer des jobs dignes de ce nom pour une jeunesse désoeuvrée et clochardisée. C’est précisément en raison de ce manque de perspectives professionnelles, avait-il insisté, que les jeunes dans son pays sont tentés de rejoindre des groupes extrêmistes, ou alors de partir à l’aventure pour rejoindre l’Europe. Les dizaines de dépouilles de migrants retrouvées il y a quelques jours dans le désert au nord du Niger, vient rappeler la dramatique pertinence de son analyse.