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04/04/2010

Dieu et les OGM

Par Catherine Morand, journaliste - Le Matin Dimanche - le 4 avril 2010

Il faut être devenu « Dieu Omniscient Soi-même » pour savoir à quoi ressemblera un monde truffé d’OGM concluait il y a 15 jours mon voisin de chronique Claude Monnier. Je me permets de le rassurer : il n’y a rien de théologique dans cette affaire. Juste un formidable business qui fait main basse sur les semences du monde, en s’arrogeant le droit de breveter et de privatiser le patrimoine de l’humanité.

 

Pour avoir un avant-goût du monde que nous préparent Monsanto, Syngenta, DuPont/Pioneer ou BASF, on peut déjà aller faire un petit tour en Argentine, où le soja transgénique et les tonnes d’herbicide qu’il exige virent au cauchemar national. Et en Inde où quelques années après l’introduction du coton Bt transgénique, les paysans, pris à la gorge par un endettement sans issue, se suicident par dizaines de milliers. Et en Afrique où Monsanto se sert du Burkina Faso comme tête de pont pour pénétrer le marché du coton, malgré les résistances.

 

Une offensive planétaire donc, assortie de pressions insensées. En voyant comment l’Union européenne peine à résister aux assauts des multinationales agrochimiques qui fabriquent des OGM, on comprend à quel point des pays économiquement sinistrés et politiquement fragiles se retrouvent sans défense face à une force de frappe qui utilise tous les moyens pour imposer ses produits ; avec l’appui de l’administration américaine, la fondation Bill Gates, la Banque mondiale, l’USAID, et beaucoup d’autres.

 

Pourtant, depuis des temps immémoriaux, les paysans produisent leurs propres semences, les échangent, les améliorent. Mais cela ne sera bientôt plus possible : il s’agira de racheter chaque année les semences brevetées, estampillées Monsanto ou Syngenta, beaucoup plus chères. Et problématiques : le 6 mars dernier, le newsmagazine India Today annonçait que Monsanto reconnaissait la faillite de son coton Bt et les ravages qu’il engendre en Inde.

 

Pas besoin d’être « Dieu omniscient », donc, pour prédire que des catastrophes génétiques se profilent à l’horizon. Il est d’ailleurs piquant de constater que les mêmes firmes qui imposent partout leurs semences clonées fabriquées à l’identique, financent à coups de milliards de dollars une chambre forte souterraine en béton sur l’archipel norvégien du Spitzberg, près du Pôle Nord, où sont stockées toute la variété des graines du monde. Le 15 mars dernier, on apprenait que cette « Arche de Noé verte » avait déjà recueilli les semences de 500'000 espèces végétales, après seulement deux ans d’existence. C’est dire si on peut attendre le déluge en paix.

  

Commentaires

Bonjour,
Chacun pense ce qu'il veut des OGM et des sociétés internationales que vous mentionnez. En tant qu'agronome, je souhaite simplement faire quelques remarques sur la manière de mener la discussion.
Il est simplement inacceptable de donner des arguments non validés que tout le monde répète comme des perroquets.

Comment peut-on ressortir cette histoire des suicides en Inde? Ces suicides sont des drames, qui étaient malheureusement là bien avant les OGM, et sont liés aux structures agraires et aux réseaux économiques, à l'héritage culturel... Tous les agronomes du développement le savent. Nous sommes las de cette ignorance et nous vous demandons de consulter les archives avant d'écrire. Par exemple, un certain Gruère (de l'IFPRI, organisation réputée) a fait assez récemment une étude très complète et a conclu qu’« Il n’y a donc pas de preuve valide d’un supposé lien de causalité entre suicides d’agriculteurs et coton Bt [OGM] en Inde ». Son interview est consultable ici: www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1214 , et le rapport complet de l'étude est ici : www.ifpri.org/publication/bt-cotton-and-farmer-suicides-india

Monsanto reconnaitrait "la faillite de son coton Bt et les ravages qu’il engendre en Inde". Je n'ai pas lu ceci sur leurs sites internet. En consultant monsanto.com ou monsanto.fr, je lis simplement que les résistances d'insectes sont des phénomènes à prévoir et qu'il faut envisager des stratégies pour éviter ou retarder leur apparition. Concernant les "ravages" en Inde, j'aimerais savoir de quoi vous parler? Comment expliquez vous que 3 ou 4 millions d'agriculteurs indiens cultivent des OGM et y reviennent année après année? Sont-ils plus idiots que la moyenne pour se faire complètement abuser et ensuite retomber dans le piège?
Les faits sont têtus... quand on veut les prendre en compte.

Bien à vous

Écrit par : yaours | 05/04/2010

Bonjour !
Merci pour votre commentaire. Le titre de l'article du 6.3 dans India Today est : "Bt cotton has failed admits Monsanto". Les suicides de paysans indiens remontent à la Révolution verte (paysans chassés de leurs terres, endettés par le prix élevé des semences hybrides nécessitant de fortes quantités d'engrais et de pesticides, etc.) mais ont connu une dramatique accélération avec l'introduction du coton Bt. J'ai eu l'occasion de sillonner des villages indiens envahis par la publicité de Monsanto faisant miroiter des revenus mirifiques à des paysans endettés. Ceux-ci sont livrés à la pub mensongère des multis agrochimiques, qui, je l'ai constaté sur place, recourent y compris à des gourous de renom pour vanter les mérites du coton transgénique. Les faits, en effet, sont têtus. Cordialement, catherine morand

Écrit par : catherine morand | 05/04/2010

Bonsoir,

Je ne peux laisser passer de telles contre-vérités. La révolution verte, loin d'être parfaite, a permis aux Indiens d'atteindre l'autosuffisance alimentaire. C'est une réalité tangible aujourd'hui, même si tous les problèmes ne sont pas résolus.
Revenons aux suicides. Le Times of India en parlait déjà en 1925! Mais avez vous au moins eu la curiosité de consulter le rapport dont je vous ai fourni les références. Si vous avez un meilleur document je suis preneur.
Et la publicité de Monsanto n'a rien à voir ici. Les paysans indiens sont, comme les paysans européens, des chefs d'entreprises, souvent petites, mais extrêmement capables de faire leurs choix.
Quant à "Bt cotton has failed", je trouve que c'est un échec tout relatif: en 2009, 5,6 millions de paysans indiens ont cultivé 8,4 millions d'hectares de coton Bt, c'est à dire 87% de la surface totale de coton du pays!!! Si c'est un échec, je suis sur que Monsanto souhaite ce genre d'échec tous les ans! et les paysans aussi d'ailleurs.
Ma source (car j'ai toujours une source) est ici:
http://www.isaaa.org/resources/publications/briefs/41/executivesummary/default.asp

Bien à vous

Écrit par : yaours | 08/04/2010

Merci pour votre article, j'espère vous lire à nouveau très bientôt. J'attends avec impatience la suite !

Écrit par : cours anglais | 13/04/2010

Les commentaires sont fermés.