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27/12/2009

Bonne année l'argent !

Par Catherine Morand, journaliste - Le Matin Dimanche - le 27 décembre 2009

  

« Bonne année l’argent ! » J’ai souvent entendu cette expression en Afrique de l’Ouest, au moment du passage à la nouvelle année. Dite avec humour dans un contexte économique sinistré, elle permet de se souhaiter mutuellement que les affaires aillent un peu mieux, qu’on puisse conserver son job ou mieux encore, puisqu’il n’y en a plus, en créer un qui permette de garder la tête hors de l’eau. Et que l’argent arrive d’une manière ou d’une autre.

 

L’expression « bonne année l’argent » a encore de beaux jours devant elle. Et pas seulement en Afrique. Ici et ailleurs, que va nous réserver 2010 ? Les docteurs ès crise économique ont repris du service, pour nous prédire, en consultant les astres, des jours meilleurs ou pires encore. Dans ce fatras de prédictions, j’ai retenu celle-ci, guère plus farfelue que beaucoup d’autres : « Compte tenu de la conjonction Jupiter-Uranus et celle, dissonante, présentée par Pluton et Saturne, ce n’est qu’au printemps 2011 que la situation globale de l’économie connaîtra une embellie ». C’est dire si chacun s’y met pour tenter de scruter l’avenir au-delà de 2009.

 

Dans le concert des spécialistes plus ou moins pertinents qui donnent de la voix sur les causes et les solutions pour sortir de la crise, celle du seul Prix Nobel d’économie que la France ait connu, Maurice Allais, brille par son absence. L’hebdomadaire français Marianne vient de lui ouvrir ses colonnes en le présentant comme « iconoclaste et… bâillonné ». Dans une Lettre ouverte aux Français, le Prix Nobel livre un credo qui dérange en s’en prenant aux « tabous indiscutés » de la religion du libre-échange, appliquée aveuglément et qui amène les pires désordres.

 

Il dénonce le dépeçage industriel de l’Europe, dont les emplois sont détruits par la concurrence déloyale de pays dont la main d’œuvre coûte infiniment moins cher. Et prône un « protectionnisme raisonnable » à leur égard, mis en place par des ensembles régionaux européens - mais aussi africains ou latino-américains - de même niveau économique, aux revenus et aux conditions sociales similaires, au sein desquels s’exercerait une saine concurrence.

 

Maurice Allais qualifie d’ignorance criminelle les appels à toujours davantage de libéralisation dans les échanges mondiaux tels que ceux lancés par Pascal Lamy, directeur de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), en proie selon lui à un entêtement suicidaire. « Il faut de toute urgence délocaliser Pascal Lamy », profère ce Prix Nobel ni libéral ni socialiste, mais bientôt centenaire, qui mérite d’être entendu à la veille d’une nouvelle année qui s’annonce pleine de bruit et de fureur.

 

  

14/12/2009

Comment briller dans les salons ?

Par Catherine Morand,  journaliste - le Matin Dimanche - le 13 décembre 2009

  

A l’heure de Facebook et de YouTube, un fond de culture générale est-il encore bien nécessaire pour briller dans les salons ou les fêtes les plus folles ? Oui, répond résolument le très déjanté et érudit Basile de Koch qui, soucieux de nous armer pour mener une vie sociale réussie, vient de publier un « Manuel d’inculture générale » aussi époustouflant que désopilant. « Vous ne savez rien, OK, mais ce n’est pas une raison pour que tout le monde le sache » lit-on dans ce beau livre vert tilleul, où l’on trouve tout ce qu’il faut avoir l’air de savoir. Merci qui ? demande donc tout à la fin Basile de Koch, par ailleurs chroniqueur à Voici, rubrique « La nuit, c’est tous les jours », dont le pseudonyme est aussi célèbre au sein du microcosme parisien que celui de son frère Karl Zéro.

 

En route donc pour un voyage hallucinant au cours duquel défile tout ce qui a compté à travers les siècles, raconté et expliqué avec un humour décapant et des références hilarantes à notre époque contemporaine. Cléopâtre, qualifiée de « beautiful loseuse » à force de « couchailler avec tous les empereurs romains sous prétexte de géopolitique » fait bien entendu partie de ce who’s who planétaire, tout comme Hegel « Quoi Hegel, qu’est-ce qu’il a Hegel ? », Karl Marx, « la classe internationale », Victor Hugo, « l’opposant le plus people à Napoléon III » ; ou encore l’empereur romain Dioclétien, sorte d’Obama avant l’heure, qui lança des réformes importantes pour tenter d’enrayer la décadence de l’Empire.

 

Au chapitre « Ramenez votre science », passage obligé par le Big Bang (initiales BB), et lorsque l’auteur écrit  Ώ, il précise que cela signifie « oméga » et non pas « mettez vos écouteurs ». Il explique aussi qu’il croira à la maturité démocratique de l’Irak ou de l’Afghanistan « le jour où la télévision d’Etat y montrera des clips de Lady Gaga » ; et se demande si l’on verra un jour réapparaître les dinosaures, dans la mesure où « même le disco, les pattes d’eph' et le marxisme ont bien fin par

revenir ».

 

Mais que l’on ne s’y trompe pas : au-delà des bons mots, des perles en série et des raccourcis inattendus, se cache un savoir encyclopédique dont Basile de Koch gratifie ses lecteurs avec générosité. Il n’en est d’ailleurs pas à son coup d’essai puisqu’il a déjà publié une « Histoire universelle de la pensée, de Cro-Magnon à Steevy », tout un programme. Et si ce night-clubbeur

invétéré était notre Diderot à nous, notre encyclopédiste du 21e siècle ? Il semble en tout cas jouir d’une vue imprenable sur le genre humain dans les derniers salons où l’on cause et, cerise sur le gâteau, ne pas se prendre top au sérieux, comme son illustre prédécesseur.